Programme

34ème Congrès Annuel de la SFT - Paris, 20-21 octobre 2008

Nanotechnologies : Evaluation du risque toxique


Nanogénotoxicologie

Daniel MARZIN
Institut Pasteur de Lille 1, rue du Pr. Calmette, BP245, 59019 Lille cedex
daniel.marzin@pasteur-lille.fr


Les nanoparticules (NP) ont jusqu'à présent fait l'objet de peu d'études de toxicologie génétique qui sont le plus souvent réalisées in vitro et les quelques études in vivo disponibles sont souvent limitées à des essais sur le poumon. Cependant des caractéristiques particulières des NP nécessitent d'adapter les tests à la voie d'administration et aux particularités de chaque NP. Il est donc nécessaire de bien connaître l'ensemble les propriétés de ces NP. Au plan du risque génotoxique, les NP sont capables d'agir par des mécanismes à la fois mécaniques et par la production de formes radicalaires. Les cibles pouvant conduire à des effets génotoxiques sont bien évidemment l'ADN, mais également les nucléosomes, les centrosomes, le cytosquelette incluant la tubuline, mais également des protéines impliquées dans le contrôle du cycle cellulaire ou les ùmécanismes de la réparation de l'ADN.

Les NP sont susceptibles de générer des formes réactives de l'oxygène (ROS) et de l'azote (RNS) par des mécanismes de génotoxicité primaire ou en vectorisant des molécules génotoxiques (par exemple les HAP). Ces ROS/RNS peuvent avoir comme origine les lésions des mitochondries, l'activation de mécanismes enzymatiques ou la perturbation des moyens de défense antioxydants. Cependant une part importante des ROS/RNS provient de façon secondaire d'une réponse inflammatoire résultant de l'exposition aux NP. La génération de ROS/RNS va conduire à l'oxydation de bases puriques et pyrimidiques, mais aussi à différentes lésions comprenant en particulier des dépurinations, désaminations et des cassures de brins d'ADN ainsi que des adduits à l'ADN par réaction avec les produits de dégradation provenant en particulier de la peroxydation lipidique. La lésion la plus caractéristique de l'attaque oxydative de l'ADN est la formation de 8-OH-dG, qui a été retrouvée dans toutes les études conduites avec des NP aussi bien in vitro que in vivo . En outre, des relations entre ce type de lésion et l'augmentation de l'incidence des mutations ont été mises en évidence. Les produits vectorisés par les NP peuvent également être transformés par les ROS/RNS conduisant à la formation de métabolites génotoxiques ce qui peut amplifier la réponse de certains génotoxiques. Au cours de la réaction inflammatoire, la mobilisation des polynucléaires neutrophiles va conduire à la production de ROS/RNS dont l'acide hypochloreux qui, outre ses effets oxydants, présente des propriétés inhibitrices du mécanisme NER de réparation de l'ADN. Très récemment, des propriétés aneugènes des NP ont été démontrées avec des NP métalliques ou de la silice. L'ensemble de ces données aura un rôle capital dans l'évaluation du risque des NP : la nature des cellules cibles, l'induction ou non de phénomènes inflammatoires au site d'application, la nécessité de pouvoir mettre en évidence l'ensemble des mécanismes de mutagenèse et l'adaptation des tests afin d'optimiser la réponse résultant des lésions oxydatives de l'ADN doivent être pris en compte.