Programme

34ème Congrès Annuel de la SFT - Paris, 20-21 octobre 2008

Nanotechnologies : Evaluation du risque toxique


Les Nanomédicaments

Pr Patrick COUVREUR
UMR CNRS 8612, Université Paris-Sud , Châtenay-Malabry


L'adressage de molécules thérapeutiques vers l'organe, le tissu ou la cellule malade constitue aujourd'hui un défi majeur pour le traitement des maladies humaines notamment infectieuses, cancéreuses ou d'origine génétique. Dès le début du vingtième siècle, le savant Paul Ehrlich rêvait déjà de « magic bullet » susceptible d'acheminer un médicament de manière spécifique vers son site d'action. Le rêve de Paul Ehrlich est aujourd'hui proche de la réalité grâce au développement des nanotechnologies qui ont permis de proposer le concept de vectorisation des médicaments (« Nanomédicaments »).

De nombreux principes actifs présentent, en effet, des caractéristiques physico-chimiques (hydrophilie, poids moléculaires, etc ...) peu favorables au passage des barrières biologiques qui séparent le site d'administration du médicament de son site d'action. D'autres molécules actives se heurtent aussi à des barrières enzymatiques entraînant leur dégradation et métabolisation rapides. L'obtention de concentrations thérapeutiques efficaces au niveau du site d'action ne peut donc se faire qu'au détriment d'une importante déperdition vers d'autres tissus ou cellules ce qui occasionne des effets toxiques parfois importants.

C'est pour toutes ces raisons que le développement de nanomédicaments a pris un essor considérable au cours des dernières années. S'appuyant sur de nouveaux concepts physico-chimiques et sur le développement de nouveaux matériaux (synthèse de nouveaux polymères, ou assemblages supramoléculaires de lipides), la recherche galénique a permis d'imaginer des systèmes sub-microniques d'administration capables : (i) de protéger la molécule active de la dégradation et (ii) d'en contrôler la libération dans le temps et dans l'espace. Quelques exemples montreront que ces nouveaux systèmes d'administration peuvent avoir un rôle considérable dans la découverte de nouveaux médicaments. Par exemple, l'administration sous forme de nanoparticules, d'un médicament anticancéreux comme la doxorubicine, permet de traiter de manière efficace les métastases hépatiques résistantes aux chimiothérapies classiques. Cette découverte a abouti à un essai clinique de phase III (en cours). Des nanotechnologies de deuxième génération permettent maintenant de délivrer de manière spécifique des molécules actives au niveau de tumeurs cérébrales ou de maladies autoimmunes entraînant des réactions inflammatoires au niveau de certains tissus du cerveau. Ces vecteurs peuvent également être adressés au niveau du site d'action pharmacologique à l'aide de ligands capables de reconnaissance à l'échelle moléculaire (cas de l'acide folique). Des approches biomimétiques permettent maintenant de tirer profit de la conformation moléculaire de lipides naturels (cas du squalène) pour les coupler à des petites molécules à activité anticancéreuse ou antivirale et développer ainsi des nanomédicaments plus efficaces susceptibles de contourner certains mécanismes de résistance. Enfin, l'utilisation des nanotechnologies ouvre des perspectives nouvelles pour l'administration à la cellule de gènes ou de petits fragments d'acides nucléiques (siRNA, oligonucléotides antisens).